Investissements vinicoles : passion du vin ou promesse de rentabilité ?

Wine Objectives est un cabinet spécialisé dans les transactions de grands domaines viticoles situés sur le pourtour méditerranéen. Son fondateur, Adam Dakin, nous explique quelles sont les motivations et les attentes des investisseurs…

Vous avez créé en 2014 votre entreprise, baptisée Wine Objectives. De quoi s’agit-il ?

Wine Objectives a été pensée pour représenter des clients souhaitant investir ou transmettre des entreprises et domaines spécifiques à la filière viti-vinicole. Nous trouvons pour eux le juste partenaire. Une fois la mise en relation vendeur/investisseur effectuée, nous accompagnons nos clients dans toutes leurs démarches, qu’elles soient fiscales, juridiques et patrimoniales, afin de mener à bien la transaction.

Vous disposez d’une expertise de 20 ans dans la filière vitivinicole. En quoi est-ce primordial dans votre activité ?

La transmission d’une propriété viticole nécessite une connaissance approfondie de l’ensemble des éléments juridiques, financiers et techniques qui sont propres à l’entreprise viticole. Un autre élément fondamental, à percevoir dans la transaction d’un domaine, réside dans le côté émotionnel et humain. La vente d’un domaine appartenant à la même famille depuis plusieurs générations, nécessite en effet de prendre en considération la dimension affective ainsi que certaines obligations patrimoniales, liées aux descendants et héritiers. Ensuite, il est bien entendu nécessaire de maîtriser le marché et ses fluctuations.

Justement, comment se situe le marché de l’investissement en terme de prix ?

En Vallée du Rhône et en Provence, les tickets d’entrée sont particulièrement élevés, en raison de la valeur immobilière mais également du prix à l’hectare, qui a flambé ces dernières années. Pour des appellations prestigieuses, comme Châteauneuf du Pape ou la Côte Rôtie, la valeur peut ainsi atteindre 500 000 euros à l’hectare. Sur d’autres terroirs de la Vallée du Rhône, notamment celui de l’Hermitage, la valeur peut grimper jusqu’à 2 millions d’euros l’hectare. Pour ce qui est du Languedoc, on assiste à une flambée des prix du foncier agricole et du bâti, mais celle-ci reste encore inégale selon les terroirs. Deux appellations sont aujourd’hui particulièrement prisées et suivent ce schéma: les Terrasses du Larzac et le Pic Saint-Loup. D’autres vignobles ont également le vent en poupe tels que la Livinière, la Clape ou encore Faugères.

Qu’est ce qui attire selon vous, les investisseurs en Languedoc ?

Le prix des terres est un véritable argument pour les investissements, en Languedoc. En Pic Saint-Loup, la valeur de l’hectare tourne autour de 60 000 euros, et elle se situe autour de 30 000 euros pour l’appellation Terrasses du Larzac. Dans les Corbières, on peut parfois même trouver des parcelles de vieilles vignes à 8 000 euros l’hectare ! La moyenne du prix des terres en Languedoc se situe donc autour de 20 000 euros l’hectare contre 70 000 à 80 00 euros, en Provence.
Les terroirs du Languedoc séduisent également, car ils ont un fort potentiel héliotropique, œnotouristique et viticole. Le vignoble languedocien est de plus en plus réputé sur le plan international, grâce à l’effort qualitatif mené depuis plus de trente ans, mais également grâce à une offre variée et adaptée au besoin des consommateurs. C’est le cas notamment des rosés.

Quel est le profil de ces mêmes investisseurs ?

Selon moi, il y a trois profils d’acquéreurs : les professionnels du négoce, qui achètent régulièrement, les amateurs étrangers et les néophytes français, qui investissent par passion. Ce sont, en général, de grands amateurs de vins qui souhaitent placer leur argent tout en se faisant plaisir. La plupart d’entre eux veulent vraiment produire eux mêmes leur vin. Ils ne souhaitent pas forcément aller jusqu’à tailler les vignes mais ils désirent participer aux assemblages et sont très impliqués dans l’élaboration du vin. Ils sont prêts à s’installer, s’intégrer mais également à participer à la vie de l’appellation et du syndicat. C’est le cas, je dirais, de 80 % des investisseurs. Après bien entendu, d’autres investisseurs confient la gestion de leur vignoble à des régisseurs. C’est le cas notamment du domaine du Météore, racheté dernièrement par un médecin britannique, Paul Jenkins. Ce dernier a confié la gestion du domaine à Vincent Balansa, mais il s’investit tout en gardant son activité, ce qui peut être nécessaire pour lancer un projet viticole. C’est en effet une filière gourmande en trésorerie !

Quelles sont, à ce titre les attentes en terme de retour sur investissement ?

Certains investisseurs s’attendent à avoir un retour sur capital de l’ordre de 5 à 10 %. Or, ils peuvent vite être déçus, malgré mes réserves émises avant même d’engager les discussions. Ce n’est pas la peine de faire rêver les gens. Mais très souvent, les investisseurs ont déjà réalisé une fortune dans d’autres industries, et sont donc bien conscients des enjeux économiques. Ils ne s’attendent pas à gagner de l’argent, mais ils ne veulent pas en perdre. Si le résultat est équilibré, ils sont globalement satisfaits. Après, il est tout à fait possible d’avoir un retour sur investissement intéressant, de l’ordre de 2%, sans compter la future plus-value des vignobles, puisque la valeur des terres continue de monter au fil du temps. Plutôt que de faire des placements boursiers incertains, les investissements vinicoles apparaissent donc comme une promesse de rentabilité stable voire croissante.

Cette promesse de rentabilité est-elle la même selon les terroirs ?

Cette promesse de rentabilité est-elle la même selon les terroirs ?
Par rapport à la Provence ou à la Vallée du Rhône, le retour sur investissement est particulièrement intéressant en Languedoc, car le prix de mise est moins important. Toutefois il est nécessaire de bien prendre en considération le marché du vin. En effet, si vous achetez un vignoble à Châteauneuf du Pape ou en Côte Rôtie, vous savez que votre récolte est déjà vendue. Dans le Languedoc, c’est un peu plus compliqué mais il y a un réel potentiel, notamment autour du rosé. D’ailleurs les appellations Pic Saint-Loup et Terrasses du Larzac sont aujourd’hui structurellement rentables.

Outre l’aspect financier, quels sont les enjeux pour les investissements de demain ?

Les investisseurs se posent beaucoup de questions notamment autour du réchauffement climatique. L’accessibilité à l’eau va devenir primordiale pour ces régions, dans les 20 ans à venir. Les domaines qui ont accès aux réseaux d’alimentation en eau et qui disposent d’un forage ou d’une installation de goutte-à-goutte seront certainement privilégiés par les futurs investisseurs, c’est évident. Un autre des enjeux majeur est l’agriculture biologique. Les consommateurs veulent du bio. Devant cette demande grandissante, nombreux sont les investisseurs à rechercher des domaines déjà convertis à une agriculture plus propre et respectueuse.

Wine Obectives a notamment réalisé la transaction, pour Marcel Guigal, du château nalys à châteauneuf du Pape. Le cabinet a également pris en charge la vente du Domaine la Brillane à Aix en Provence à Walter Butler et celle du Domaine saint Jean de Villecroze à à Villecroze (83) à William Chase, le fondateur des chips Tyrells. Adam Dakin, a par ailleurs assisté la famille de fourtou dans la reprise du domaine Jean-Michel Alquier, considéré comme l’une des plus grandes références de l’AOP Faugères. Enfin dernièrement, il a orchestré la vente du Château Capion au russe Oleg Chirkunov.

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