La fermeture de verreries en Ukraine et la crise énergétique ont aggravé la pénurie de bouteilles de verre en Europe. Une aubaine pour les réseaux de réemploi du verre ? Éléments de réponse avec Sophie Graziani-Roth, responsable marketing et communication chez Oc’Consigne.
La consigne du verre ne date pas d’hier. Dans les années 60, il était d’usage de ramener sa bouteille consignée en échange de quelques centimes, la consigne. Mais trente ans plus tard, avec la prolifération des emballages à usage unique, la consigne a disparu.
Pourtant, depuis peu le sujet revient sur le devant de la scène. Et pour cause ! « Le Covid et la guerre en Ukraine ont engendré la fermeture d’un grand nombre de verreries et avec elles celles de quasiment toutes les chaînes de production en Europe », explique Sophie Graziani-Roth, responsable marketing et communication chez Oc’Consigne.
Selon les chiffres de l’Ademe, la consigne permet d’économiser jusqu’à 76 % d’énergie, 33 % d’eau et 79 % des émissions de gaz à effet de serre par rapport au recyclage.
En France, seulement 1% des bouteilles sont réemployées.
Autre difficulté : l’augmentation du coût des matières premières et de l’énergie se répercute désormais sur le prix d’achat des bouteilles vides, qui enregistre une hausse de plus de 22 % (chiffres : décembre 2022). Cette augmentation cumulée aux problèmes d’approvisionnement obligent certains producteurs à chercher des alternatives de conditionnement, pour sécuriser leur approvisionnement.
Une solution économique et écologique
Parmi les solutions, le réemploi des bouteilles en verre fait l’unanimité, auprès des vignerons. « Il faut dire qu’aujourd’hui, récupérer des bouteilles déjà utilisées devient moins cher que d’en acheter des nouvelles » souligne Sophie Graziani-Roth. L’argument est donc avant tout économique, souligne la responsable marketing, mais pas seulement.
Le réemploi des bouteilles a également de sérieux atouts, sur le plan environnemental. « Une même bouteille en verre peut être réutilisée jusqu’à 50 fois sur une période de 10 ans ! Ainsi, sur toute sa durée de vie, une bouteille consignée n’émet que 21% du CO² émis par une bouteille en verre normale », précise la responsable marketing.
De plus, la consigne présente des avantages par rapport au système de gestion de déchets classique : le recyclage. « Le recyclage est une bouteille en bon état qu’on casse. Celle-ci est ensuite broyée en calcin, puis chauffée entre 1500°C et 1800°C pendant 24 heures sans interruption.. En outre, si le verre est réutilisable à l’infini, pour refabriquer une bouteille, il faut réinjecter en moyenne 56 % de sable. Or, cette matière n’est pas illimitée. Il faut par ailleurs aller le puiser au fond des océans, ce qui a un impact environnemental catastrophique ».
Une filière et des réseaux à reconstruire
La consigne est donc clairement plus vertueuse. La condition, tout de même : que la collecte de verre s’inscrivent sur un périmètre restreint pour réduire au maximum le nombre de kilomètres à faire parcourir aux bouteilles. Et c’est là que le bât blesse…
« Aujourd’hui il y a tout à reconstruire pour que la filière fonctionne. Il faut repenser voire réinventer un nouveau modèle, de nouveaux réseaux de collecte et canaux de distribution. Le retour de la consigne exige également de revoir entièrement la conception de bouteilles afin qu’elles soient adaptées au réemploi, c’est à dire standardisées. Du côté des producteurs, le réemploi du verre nécessite également de revoir certains process, notamment limiter les emballages, capsules et collerettes, et changer d’étiquettes. Il fait donc réussir à convaincre les producteurs de vin, mais aussi les imprimeurs, les fabricants de bouteilles ou encore les distributeurs. C’est toute l’incertitude du moment, mais c’est aussi un pari sur l’avenir », affirme Sophie Graziani-Roth.
Aujourd’hui, France Consigne c’est 700 points de collecte et 400 producteurs engagés sur tout le territoire.
Une partie de la réponse dépend ainsi de la capacité de ces réseaux à s’organiser pour répondre aux besoins. Depuis 2021, la coopérative montpelliéraine Oc’Consigne a d’ailleurs enclenché la dynamique. Elle est ainsi à l’initiative de la création de l’association France Consigne, qui regroupe dix entreprises de réemploie en France. L’objectif : fédérer les acteurs de la filière des emballages en verre pour développer la pratique du réemploi en France. « Il est essentiel de nous regrouper pour monter en qualité et mutualiser les connaissances et les expériences. L’idée est également de créer de nouvelles normes et labellisation afin d’encadrer les procédés et assurer une meilleure traçabilité. France Consigne souhaite en ce sens devenir, à terme, un organe de certification », indique Sophie Graziani-Roth .
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